Obligation vaccinale – Des soignants non-vaccinés « suspendus » et pas encore réintégrés – Témoignage d’Elsa, éducatrice spécialisée et suspendue depuis 17 mois.

Aujourd’hui, deux personnes m’ont proposé d’écrire un mot à destination des lecteurs du site du NPA 34. Chaque fois que nous avons l’occasion de sortir de l’invisibilité, mes camarades suspendus et moi, nous sommes ravis. 

Je suis éducatrice spécialisée dans un petit service médico-social qui accompagne des adultes qui présentent des troubles psychiques handicapants et je suis suspendue sans salaire depuis 17 mois bientôt, pour avoir refusé de me soumettre à l’obligation vaccinale. Je ne suis, comme mes camarades, ni complotiste, ni anti-vax. Nous avons simplement refusé de céder à la menace de nos directions et sommes, pour cela, sévèrement punis. Renoncer à nos salaires est une chose. Se voir interdits d’exercer nos « métiers-passion » en est une autre. 

Au lendemain de l’abandon des dernières mesures liées au Covid (à savoir : les salariés ne sont plus aujourd’hui obligés de s’arrêter de travailler lorsqu’ils ont un test positif, et des jours de carences sont mis en place, comme pour les autres arrêts maladie), quid de nos réintégrations ? 

Le gouvernement et les médias ne lâchent pas, nous restons suspendus, toujours pour une durée indéterminée.

Les principaux arguments médiatiques pour orienter l’opinion de la population restent les mêmes depuis le début:

– « ils ont désobéi », répètent les radios et les journaux. À cela nous répondons que refuser d’obéir n’est pas toujours désobéir. En effet, nous avons là fait face à une menace que nous estimons injuste. Le respect du principe de précaution n’a pas été respecté. Le respect de la notion de consentement libre et éclairé n’a pas été respecté. Le droit du travail s’est trouvé bafoué : une suspension sans salaire pour une durée indéterminée, voilà bien un inédit dans le code du travail, nous aurions dû observer une levée de bouclier, dès le 5 août 2021. Pourtant, les syndicats sont restés muets.  

– « Ils manquent d’éthique professionnelle ». La Haute Autorité de Santé a en effet annoncé cela en juillet dernier pour justifier la poursuite de nos suspensions. Ils n’ont cependant pas pris le temps de définir ce qui, selon eux, relève de l’éthique professionnelle. Nous n’avons eu de cesse de nous questionner sur nos pratiques et sommes prêts à répondre à quiconque souhaite vérifier que nous méritons tous nos diplômes. Par ailleurs, parmi les suspendus, nombreuses sont les personnes qui n’avaient aucun contact avec les patients (personnels administratifs, ASH, etc.). Comment justifier, accepter leur suspension ?

– « Ils sont très peu nombreux, leur réintégration ne résoudrait donc pas la crise de l’hôpital ». Là dessus, nous sommes tout à fait d’accord ! L’effondrement de nos services publics, notamment nos services de santé, ne date pas de la crise sanitaire alors évidemment, notre retour dans les services ne résoudrait pas tout ! En revanche, sur le nombre de personnes concernés, nous savons que nous sommes bien plus nombreux que ce qui est affirmé dans les médias. Le refus des hôpitaux, cliniques, et autres services médico-sociaux de donner les chiffres exacts des personnels suspendus en est un révélateur flagrant, qui rend notre recensement impossible. Lorsque les journalistes évoquent les soignants suspendus, ils réduisent la liste des corps de métiers concernés : parmi nous : médecins généralistes, psychologues, psychiatres, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, infirmiers, aides soignants, juristes, ambulanciers, éducateurs, pompiers, etc.

Quel que soit votre point de vue sur l’efficacité et la nécessité de la vaccination massive, nous vous invitons à entendre que l’obligation vaccinale a été pour nous la goutte d’eau qui a fait déborder le lac des incohérences à l’œuvre dans notre secteur. Nous dénonçons ici un système de soin qui marche sur la tête. Au delà de la question de nos corps, nous sommes attachés à l’inconditionnalité de l’accès aux soins. Nous refusons d’aller toujours plus vite vers une logique où seuls ceux qui ont les moyens de le faire pourront se faire soigner correctement.

La logique financière a depuis trop longtemps pris le pas sur le bon sens en matière de santé. Ensemble, patients, familles et soignants, revenons à la raison ! 

L’état d’urgence sanitaire a justifié trop de mesures injustes, insupportables. Nous n’avons pas eu accès aux allocations chômage, et les personnels hospitaliers, du 15 septembre au mois d’avril suivant, n’ont pas eu le droit de travailler dans d’autres secteurs ! Pas de revenus et pas le droit de travailler, nulle part ! 

Beaucoup d’entre nous se retrouvent en grande précarité, il est urgent que cette situation prenne fin. Pour une fois, le gouvernement a choisi le terme adéquat : nous sommes réellement suspendus, nous avons les pieds hors sol depuis presque un an et demi, il nous est impossible de nous projeter tant qu’aucune issue ne se profile.

Nous appelons les organisations syndicales et toutes les forces de gauche à nous soutenir officiellement. 

Si vous souhaitez nous questionner ou nous soutenir (moralement ou financièrement), vous pouvez vous rapprocher du collectif des Blouses Blanches Libres 34,sur facebook  (Collectif Blouses Blanches Libres) ou sur le site https://bbl34.fr/

Lien vers l’article d’origine du site NPA 34

tas d'urgences

manifestation de soignants suspendus au peyrou
action des soignants devant l'ARS

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